Acheter à deux sans être mariés ? Protégez-vous

Si vous achetez une maison à deux sans être mariés et sans avoir réalisé une déclaration de cohabitation légale, pensez à vous protéger en cas de décès de l’un d’entre vous. En ce sens, vous pouvez insérer dans votre acte d’achat une clause d’accroissement ou de tontine. Dans le cas contraire, si vous décédez en n’ayant prévu aucun disposition, votre part dans la maison et les meubles reviendront à vos héritiers plutôt qu’à votre partenaire. Votre partenaire, sans mariage ou cohabitation légale, n’a, aux yeux de la loi, aucun droit sur votre part. Il risque donc de perdre tout droit dans la maison à votre décès.

Le testament, une solution « empoisonnée » pour les cohabitants de fait

Vous pouvez bien sûr rédiger un testament attribuant à votre partenaire vos droits dans la maison, mais :

-Vous risquez de vous heurter à la réserve (la part d’héritage réservée par la loi) de vos enfants. Le testament ne pourrait donc n’avoir d’effet que pour une partie de la maison (sauf dans certains cas, notamment si vous possédez plusieurs biens) ;

-Le testament est fragile : il peut être perdu, déchiré ou révoqué.

-Même si vous ne laissez pas d’enfants, votre partenaire devra payer (en Région wallonne et bruxelloise) des droits de succession très élevés (pouvant atteindre 80%), calculés au tarif entre étrangers.

Mais pour éviter ces inconvénients liés au testament pour les cohabitants de fait, des solutions existent.

La clause d’accroissement, une garantie de droit et une économie fiscale

Afin d'éviter ces problèmes, Marc et Julie pourraient demander d'insérer dans leur acte d'acquisition une clause d'accroissement ou une clause de tontine (cette dernière est toutefois tombée en désuétude au profit de la clause d’accroissement, qui ne nécessite pas l’intervention du vendeur en cas de modification ultérieure). Cela signifie que, si l'un des deux décède, le survivant sera le seul propriétaire de la maison. Dans ce cas, aucune indemnité ne sera versée par Julie aux héritiers de Marc.

Cette clause permet de remédier aux 3 difficultés précitées :

-Il n’y a plus de risque de perte ou de destruction lié au testament puisque la clause figure dans l’acte d’achat.

-La réserve des héritiers de Marc n’est pas applicable : Julie sera seule propriétaire. Plus question de devoir partager avec les enfants ou les autres héritiers éventuels. Julie aura tous les droits, et pourra vendre la maison seule si elle le désire. Elle est donc en principe totalement protégée.

-Cette solution est aussi beaucoup plus intéressante d’un point de vue fiscal : Julie ne devra pas payer de droits de succession. Elle paiera uniquement le droit d’enregistrement de l’acte de vente, à savoir 12,5 % (en Wallonie et à Bruxelles) sur la valeur de la part de Marc.

Autrement dit, lors du décès de votre partenaire, ses droits en pleine propriété (ou en usufruit) dans l’immeuble pourront vous revenir. Vous ne paierez alors que 12,5% de droits d’enregistrement (applicables à la vente) plutôt que des droits de succession élevés. Ce système offre donc non seulement une garantie de droit mais également une économie fiscale, l’une et l’autre manifeste. Mais cette clause peut présenter des inconvénients et doit être modalisée. Il convient de laisser une porte de sortie, en cas de litige, et de limiter la portée de cette clause dans le temps. Par ailleurs, en présence d’enfant(s), il pourra être conseillé de se limiter à un accroissement en usufruit.

Renseignez-vous auprès d’un notaire : il vous proposera la solution la plus adaptée à votre situation.

Attention : la clause d’accroissement peut présenter un inconvénient fiscal si Marc et Julie décident de se marier ou de devenir cohabitants légaux. En effet, dans ce cas, en cas de décès de l’un d’entre eux, ils paieront le droit d’enregistrement de 12,5% alors que, étant devenus cohabitants légaux ou conjoints, ils auraient bénéficié de droits de succession réduits voir nuls. Il est donc important de limiter la clause d’accroissement dans le temps, et/ou de prévoir que la clause ne sera plus d’application en cas de mariage ou de cohabitation légale, voire même en indiquant qu’elle sera tacitement prorogée à l’échéance du terme, sauf opposition des parties.

On peut également conseiller aux parties de prévoir une clause d’accroissement optionnelle en pleine propriété et/ou en usufruit. De cette manière et en fonction des circonstances, le survivant des partenaires pourra choisir, au décès du prémourant, s’il exerce ou non la clause d’accroissement et s’il désire qu’elle porte sur la pleine propriété ou qu’elle soit limitée à l’usufruit.