Comment sortir d'indivision

Plusieurs personnes sont copropriétaires d'un immeuble. Cette situation peut devenir difficilement supportable. Que peuvent-ils faire ?

Une indivision (deux ou plusieurs propriétaires d'un même immeuble) peut poser certains problèmes. Qui pourra habiter l'immeuble ? Qui s'occupera de la location et recevra les loyers ? Qui paiera les charges et le précompte ? Qui s'occupera des réparations et en supportera le coût ?

Si les propriétaires s'entendent pour gérer cette indivision, il n'y a aucun problème. Par exemple dans le cas d'un ménage où les deux époux sont copropriétaires. Il suffit de régler ces questions entre eux.

De même, si les copropriétaires veulent s'empêcher mutuellement de demander la vente ou le partage de l'immeuble, ils peuvent signer un acte notarié par lequel ils s'engagent à rester en indivision. Cet engagement ne peut toutefois être pris que pour cinq ans.

Certaines situations d'indivision sont parfois très difficiles à gérer, comme la situation d'un couple qui se sépare, des associés qui changent d'activité, certains héritiers qui préfèrent un capital plutôt qu'un droit immobilier. À ce moment se pose le problème de la sortie d'indivision.

 

Si tout le monde s'entend

 

La solution la plus simple est de décider de mettre l'immeuble en vente. Cette vente peut se faire de gré à gré ou publiquement. Il faut déjà s'entendre sur le principe de la mise en vente et décider ensemble du mode de vente.

Pour vendre de gré à gré, il suffit de trouver un acquéreur, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un tiers. Cependant, si les vendeurs se méfient l'un de l'autre, ils préféreront certainement la vente publique volontaire qui présente le plus de garantie de transparence ou de sincérité du prix : un notaire étant chargé de toute la procédure, personne ne pourra prétendre qu'un autre indivisaire se sera entendu avec l'acquéreur pour avoir avec lui un arrangement spécial!

Le prix de vente ainsi obtenu servira à payer les dettes qui pourraient exister (par exemple, les remboursements hypothécaires et les frais de mise en vente) et le solde sera partagé entre les copropriétaires en fonction de leurs droits respectifs.

Si un des copropriétaires désire reprendre l'immeuble, il pourra proposer de racheter les parts des autres : cela s'appellera une cession de droits indivis. Comment faut-il calculer la somme à payer ? Même s'il n'y a pas de formule précise pour la déterminer, il faut trouver la solution la plus juste : celui qui cède sa part voudra en obtenir autant que dans la première solution, celle de la vente à un tiers. Dès lors, il faudra procéder de la façon suivante : on prend pour base de départ la valeur de l'immeuble (qu'on peut faire estimer si les propriétaires ne s'entendent pas sur cette valeur), dont on déduit les charges (par exemple le remboursement hypothécaire), et le solde est à diviser entre les propriétaires en fonction de leurs droits. Celui qui reprend devra payer ce solde aux autres en s'engageant à rembourser à leur décharge le solde du prêt. Bien entendu, cette solution n'est possible qu'avec l'accord du créancier hypothécaire qui devra décharger les anciens copropriétaires.

L'avantage de cette formule est que celui qui rachète ainsi la part des autres ne devra pas payer les mêmes frais que dans le cadre d'une acquisition. Dans ce cas, le droit d'enregistrement (la taxe fiscale à devoir supporter) ne sera que de 1% (en Flandre, il sera de 2,5%), mais il sera calculé non pas sur la valeur de la part achetée, mais bien sur tout l'immeuble. Il faut y ajouter les autres frais de l'acte notarié et le montant total des frais d'acte sera d'environ 2% (pour une maison de 250.000 € par exemple). S'il y a plusieurs copropriétaires et si l'un d'entre eux rachète la part d'un autre, mais sans devenir seul propriétaire de l'ensemble, le droit d'enregistrement ne sera calculé que sur la valeur de la part cédée.

Dans certaines situations, la loi prévoit un droit de préférence pour un des copropriétaires qui aura une priorité pour racheter la part des autres. Cela s'appelle l'attribution préférentielle que l'on peut retrouver dans le cadre de la liquidation de certaines successions ou de communautés conjugales.

Tout ce qui précède n'est valable qu'en cas d'accord unanime des copropriétaires, mais un des copropriétaires peut exiger sa part, et si on ne s'accorde pas sur la vente ou la cession à un des copropriétaires, il faudra recourir à la procédure judiciaire.

 

Sinon par voie judiciaire

 

Le Code Civil prévoit que nul ne peut être tenu de rester en indivision. Cela signifie que chaque copropriétaire peut exiger de recevoir "sa part" et peut donc forcer la vente de l'immeuble.

La procédure pour y arriver n'est pas si aisée. Il faut tout d'abord s'adresser au Tribunal de Première Instance pour introduire une procédure en "assignant" les autres propriétaires. Cela veut dire qu'un huissier devra se présenter chez chacun d'eux pour leur notifier la date à laquelle la procédure sera introduite devant le Tribunal. Cette procédure s'introduit par l'intermédiaire d'un avocat et le Tribunal prononcera un jugement ordonnant la sortie d'indivision et nommera un notaire pour procéder aux opérations de vente et de partage du prix. Si un des copropriétaires s'oppose à cette vente, il devra faire valoir ses arguments auprès du Tribunal lors de l'audience. Celui qui n'accepte pas la décision du Tribunal peut toujours aller en appel et la procédure est suspendue jusqu'à ce que la Cour d'appel ait prononcé son arrêt.

Le Tribunal ou la Cour d'appel nommera également un autre notaire chargé de représenter celui des copropriétaires qui n'interviendrait pas volontairement dans les opérations de vente. La procédure pourra donc être poursuivie en la présence ou en l'absence des autres copropriétaires.

Après cette phase judiciaire, le copropriétaire qui désire forcer la vente doit demander au notaire de commencer les opérations. À ce moment, le notaire tentera de réunir toutes les parties et attirera leur attention sur les avantages d'une procédure amiable en proposant toutes les solutions possibles. Jusqu'à ce moment, il sera possible de suspendre ou d'arrêter la procédure.

Si malgré tout aucune solution amiable n'existe, il faudra recourir à la vente. L'immeuble devra être exposé en vente publique. À partir du moment où cette procédure est lancée, elle ne peut plus être arrêtée que de commun accord des parties. Ainsi si celui qui a introduit la procédure le regrette, il ne peut plus l'arrêter sans l'accord des autres. Chacun peut acquérir en vente publique, et si un des copropriétaires le souhaite, il peut se porter acquéreur. Dans ce cas, il paiera des droits fiscaux nettement inférieurs.

Cette vente étant ordonnée par le Tribunal, elle se fera avec une faculté de surenchère.

Lorsque la vente sera définitive, le notaire procédera au partage du prix en fonction des droits respectifs de chacun des copropriétaires.

La procédure de sortie d'indivision judiciaire s'avère ainsi beaucoup plus longue et plus coûteuse qu'une procédure de vente amiable : on sait quand la procédure est lancée, mais on ne sait jamais quand elle sera terminée, et quels sont les frais de procédure qu'elle va engendrer. Elle s'avère moins intéressante au niveau financier en raison de ces frais, et elle risque d'entraîner un perte de dialogue entre les copropriétaires, ce qui attise les tensions et engendre une mésentente souvent définitive.