Acheter un bien immobilier à deux sans être mariés : protégez-vous en cas de décès
Cet article a été rédigé le 18/06/2018 en fonction de la réglementation en vigueur à cette date. Besoin d'informations spécifiques ou de conseils adaptés à votre situation ? Consultez une étude notariale.
1/ Cohabitants de fait : prévoyez une clause Une clause est une phrase ou un ensemble de phrases contenues dans le texte d'un acte juridique où sont définis les droits et les obligations des personnes concernées par cet acte. d’accroissement (ou de tontine) dans votre acte Document écrit qui constate une convention passée entre une ou plusieurs personnes. On distingue l'acte sous seing privé qui est établi par les cocontractants sous leur seule signature de l'acte authentique qui est dressé et reçu par une personne dotée d'une autorité publique, comme le notaire. L'acte authentique est revêtu de la force exécutoire (comme pour un jugement), ce qui signifie que les signataires peuvent donc, en principe, faire appel directement à un huissier en cas de non-respect de l'acte. d’achat
Si vous achetez une maison à deux sans être mariés et sans avoir réalisé une déclaration de cohabitation légale, pensez à vous protéger en cas de décès de l’un d’entre vous. En ce sens, vous pouvez insérer dans votre acte d’achat une clause d’accroissement ou de tontine. Dans le cas contraire, si vous décédez en n’ayant prévu aucun disposition, votre part Titre de propriété portant sur le capital d’une entreprise. On parle de « part » dans le cadre d’une société simple (SNC ou SComm), contrairement aux SA, SRL et SC pour lesquelles on parle d’actions. dans la maison et les meubles reviendront à vos héritiers plutôt qu’à votre partenaire. Votre partenaire, sans mariage ou cohabitation légale, n’a, aux yeux de la loi, aucun droit sur votre part. Il risque donc de perdre tout droit dans la maison à votre décès.
Le
testament
Un testament est un écrit qui reprend les dernières volontés d’une personne. Le testateur (=l’auteur du testament) y précise comment et à qui ses biens reviendront après son décès. Il y a trois formes de testaments : olographe, authentique et international. Chaque forme de testament présente des avantages et des inconvénients.
, une solution «empoisonnée » pour les cohabitants de fait.
Vous pouvez bien sûr rédiger un testament attribuant à votre partenaire vos droits dans la maison, mais :
- vous risquez de vous heurter à la
réserve
Part du patrimoine dont on ne peut disposer librement par donation ou testament et revenant aux héritiers légaux (conjoint survivant et descendants par exemple).
(la part d’héritage réservée par la loi) de vos enfants et de vos parents (attention, la réserve des parents disparaît le 1er septembre 2018). Le testament ne pourrait donc n’avoir d’effet que pour une partie de la maison (sauf dans certains cas, notamment si vous possédez plusieurs biens) ; - même si vous ne laissez ni enfants ni parents, votre partenaire devra payer (en Région wallonne et bruxelloise) des
droits de succession
Sommes perçues par le Trésor à l'occasion d'un décès et calculés sur l'actif net du défunt, lequel s'obtient comme suit : actif brut moins le passif.
• Actif brut : ensemble des valeurs (titres, espèces, obligations,
immeubles, …).
• Passif : ensemble des dettes (emprunts hypothécaires et
personnels, loyers impayés, frais d'enterrement,
etc.).
très élevés (pouvant atteindre 80%), calculés au tarif entre étrangers.
Mais pour éviter ces inconvénients liés au testament pour les cohabitants de fait, des solutions existent.
La clause d’accroissement, une garantie Une garantie est un engagement qui assure l’exécution d’un contrat, d’une obligation. En l’occurrence, la garantie est la somme versée par l’acquéreur à la signature du compromis. Cette somme reste sa propriété jusqu’au jour de la signature de l’acte où elle devient un acompte à valoir sur le prix de vente. de droit et une économie fiscale.
Comme évoqué, une « clause d’accroissement optionnelle » peut être insérée dans votre acte d’achat : en cas de décès de l’un d’entre vous, le survivant pourra, le cas échéant, acquérir la part en pleine propriété (ou en
usufruit
L'usufruit est un droit, démembré du droit de propriété, d'utiliser et de percevoir les fruits du bien sur lequel il repose. En d'autres termes, l'usufruitier a un droit sur le produit de quelque chose dont quelqu'un d'autre est propriétaire (ce dernier est appelé le "nu-propriétaire").
On peut comparer l'usufruit à un pommier : l'arbre lui-même appartient au nu-propriétaire, mais l'usufruitier peut cueillir les pommes sur l'arbre sa vie durant.
L'usufruitier ne peut pas jamais aliéner le bien (le vendre ou le donner).
Si l'usufruit porte sur un immeuble, l'usufruitier peut continuer à occuper le bien. Il peut aussi le louer et en percevoir les loyers,
Si l'usufruit porte sur un meuble (une voiture par exemple), il peut continuer à l'utiliser sa vie durant.
Si l'usufruit porte sur de l'argent ou des comptes, il peut en percevoir les intérêts (le capital, quant à lui, reste la propriété du nu-propriétaire).
L'usufruitier a par ailleurs des devoirs : il doit maintenir la propriété en état (les frais d'entretien sont à sa charge, le nu-propriétaire, quant à lui, doit seulement se charger des grosses réparations).
) du partenaire décédé.
Autrement dit, lors du décès de votre partenaire, ses droits en pleine propriété (ou en usufruit) dans l’immeuble pourront vous revenir. Vous ne paierez alors que 12,5% de droits d’
enregistrement
Tous les actes notariés sont déposés par le notaire à l'administration de l'enregistrement dans les 15 jours de la signature. Cette administration dépend du ministère des finances: sa première fonction est donc d'ordre fiscal. En déposant l'acte, le notaire devra verser le montant des droits (taxe) dus au Trésor public. L'administration lui rendra l'acte, après y avoir apposé un cachet indiquant le lieu et la date de l'enregistrement et le montant des droits perçus.
(applicables à la vente) plutôt que des droits de
succession
Transmission du patrimoine d'une personne défunte ou masse du patrimoine ainsi transmis.
élevés. Ce système offre donc non seulement une garantie de droit mais également une économie fiscale, l’une et l’autre manifeste. Mais cette clause peut présenter des inconvénients et doit être modalisée. Il convient de laisser une porte de sortie, en cas de litige, et de limiter la portée de cette clause dans le temps. Par ailleurs, en présence d’enfant(s), il pourra être conseillé de se limiter à un accroissement en usufruit.
Renseignez-vous auprès d’un notaire : il vous proposera la solution la plus adaptée à votre situation.
2/ Cohabitants légaux, prévoyez, le cas échéant, un testament, ou une clause d’accroissement en pleine propriété.
Contrairement aux cohabitants de fait, en cas de décès de son partenaire, le
cohabitant légal
Les cohabitants légaux sont les personnes qui, sans être mariées, ont fait constater leur volonté de vivre ensemble par le biais d’une déclaration écrite, remise à l’officier de l’état-civil de la commune dans laquelle le domicile retenu est situé. Du point de vue du droit fiscal des successions, les cohabitants légaux sont assimilées aux époux. Plus d'infos
hérite automatiquement de l’usufruit du
logement familial
Le logement familial est le lieu privilégié où la famille se loge, mange, partage ses loisirs : là où elle vit et où chacun de ses membres peut s'épanouir.
Il s'agit du lieu où la famille habite réellement. Il ne s'agit pas nécessairement du domicile. Ainsi, une même personne pourrait avoir un domicile (où elle exerce par exemple son activité professionnelle) et une résidence (où elle habite avec son conjoint et ses enfants).
Le logement familial bénéficie d’une protection : lorsqu’il appartient à un seul des époux ou cohabitant légal, celui-ci ne peut vendre ou hypothéquer cet immeuble sans l’accord de son époux ou de son cohabitant légal.
et des meubles qui le garnissent. Attention cependant, ce droit peut être annulé par simple testament : le cohabitant légal n’est pas un
héritier réservataire
Héritier qui ne peut être privé d'une certaine part de la succession appelée "réserve". Il s'agit du conjoint survivant et des (petits-)enfants.
Plus d'infos
(protégé), contrairement à un(e) époux(se). Hors testament contraire, donc, si votre partenaire (cohabitant légal) décède, vous héritez de l’usufruit de la maison (vous pouvez entre autres continuer à l’occuper), mais vous n’héritez pas de la
nue-propriété
Propriété d’un bien sur lequel une autre personne a un droit d’usufruit. Le nu-propriétaire ne peut utiliser ni jouir de ce bien. La nue-propriété est le droit donnant au nu-propriétaire la faculté de disposer d’une chose mobilière ou immobilière (il peut la vendre, la donner, la léguer) alors que l’usufruitier dispose seulement du droit d’en avoir l’usage.
(ce qui vous empêchera notamment de décider seul de sa vente), qui reviendra aux héritiers de votre partenaire (enfants ou parents) à moins de prévoir cette attribution par testament ou en prévoyant une clause d’accroissement en pleine propriété.
Avec ou sans enfants ?
Pour hériter de la pleine propriété de la totalité de la maison en cas de décès, les cohabitants légaux doivent donc rédiger un testament par lequel chacun d’eux lègue sa part (du logement familial) en pleine propriété à son partenaire, tout en respectant la réserve des enfants (ou des parents – jusqu’au 31 août 2018). En présence d’enfants, que vous voulez protéger, votre partenaire verra néanmoins ses droits sauvegardés : il reccueillera l’usufruit par l’effet de la loi ; un testament n’est dès lors pas toujours nécessaire.
Pas de droits de succession à payer sur le logement familial.
Contrairement aux cohabitants de fait, une clause d’accroissement est rarement intéressante pour les cohabitants légaux (sauf à prévoir une clause d’accroissement en pleine propriété) car le partenaire survivant, qui hérite de l’usufruit du logement familial, est totalement exonéré, comme un(e) époux(se), des droits de succession sur le logement familial. Toutefois, dans certains cas, il peut être intéressant de prévoir une clause d’accroissement optionnelle pour les cohabitants légaux.
Exemple : vous achetez ensemble un autre bien (une résidence secondaire, un appartement que vous mettez en location, …) pour lequel vous ne bénéficierez pas de l’exonération des droits de succession sur ce bien, qui ne constitue pas le logement familial. La clause d’accroissement pourrait présenter un intérêt similaire si l’un des partenaires décide finalement de ne laisser aucun droit au partenaire sur sa part dans la maison (pas même l’usufruit !) en révoquant son testament.
En conclusion, si vous achetez à deux sans être mariés, renseignez-vous auprès d’un notaire pour savoir si une clause d’accroissement/tontine (optionnelle) est opportune dans votre cas ou si un testament est recommandé. Ce notaire vous conseillera au mieux en fonction de votre situation.